Le visiteur
Leonora Miano

Prologue

Comme toujours à cette heure, le chant de l’homme se fit entendre. Arpentant les rues du quartier, il hélait les habitants, traînant derrière lui un chariot. Son appel les faisait sortir en courant de leurs maisons et, en un rien de temps, la caisse à roulettes se remplissait de bouteilles vides. Elles avaient contenu du soda, de la bière la plupart du temps. Pour la peine, on lui remettait une pièce de cent francs. Bientôt, son chant s’éteignit dans le lointain. La nuit tomba alors, comme elle savait le faire dans ce pays, sans crier gare.

D’habitude, ce moment de la journée était son préféré. Un autre rythme s’emparait de la ville. Les marchandes de beignets et de poisson grillé remplaçaient leurs homologues qui, de l’aube au crépuscule, avaient proposé d’autres denrées. Les gamins des familles déshéritées prenaient place sous les réverbères pour faire leurs devoirs, tandis que les commères plantaient une chaise devant le portail de leur demeure, afin que rien ne leur échappe de la vie qui s’ébrouait là. Des rires étaient dans l’air.

Assise dans un coin de la cour, près de l’endroit où quelques bambous avaient
été arrachés à la clôture, Salomé regardait s’agiter le monde au dehors. Il lui était interdit de sortir, de fréquenter les enfants des quartiers comme disaient ses parents pour désigner les mal lotis. Aussi, c’était de loin qu’elle prenait part à leurs jeux, les enviant presque de vivre dans des maisons dépourvues d’électricité. Le spectacle de la rue la ravissait. Elle connaissait tout le monde, le moindre visage, les histoires de cœur naissantes, celles qui s’étaient achevées dans la fureur et les larmes.

Aujourd’hui, rien de tout cela ne l’intéressait. Salomé ne salivait pas à l’idée de goûter les maquereaux cuits à la braise, sur lesquels le vent apportait un peu de poussière pour parfaire l’assaisonnement. Sa mère disait que c’était plein de microbes, que c’était sale. Mais elle disait aussi qu’il ne fallait pas avaler les pépins des oranges, de peur qu’un oranger vous pousse sur la tête. Salomé, excitée à la pensée d’un arbre prenant racine au milieu de son crâne, avait fréquemment défié l’interdit. En vain. Depuis, elle n’accordait qu’un crédit relatif aux dires de sa mère.
Pourtant, c’était la parole maternelle qui la troublait ce soir, lui gâchant le plaisir de l’observation. Quelques mots énoncés avec mépris, d’une voix sèche : « Ce sont nos gens, je leur parle comme il sied. Ils peuvent s’estimer heureux d’avoir été admis dans la famille… » Salomé se leva, fit quelques pas vers la maison, s’arrêta sous le manguier dont une chauve-souris avait croqué des fruits encore verts. Elle avait un peu peur de rentrer. « Ce sont nos gens. » Ces mots lui pesaient sur le cœur. Pourquoi ? Elle n’aurait pu le dire. Il lui venait simplement une intuition. Comme un soupçon. Elle devait savoir. Comprendre. Demain, elle irait interroger sa mère.

Le visiteur
Bruno

Le visiteur

Toute la foule le vit traverser cette espace sans prêter attention à lui.
Au milieu de l’effervescence, il vit le regard d’une jeune enfant assise derrière une clôture de bambou, malgré l’éloignement et sans doute à cause de la lumière particulière. Elle lui fit signe ; il alla lui demander où il pourrait trouver un hôtel. Mais les quelques mots du pays qu’il connaissait ne suffisaient pas, il essaya en allemand, pensant que si elle allait à l’école des missionnaires , elle devait pouvoir comprendre.
Alors elle commença à parler, elle lui demanda pourquoi il était là, qui il venait rencontrer. Il avait entendu parler de cette chorale et il était venu pour l’écouter, il venait de loin et ne connaissait personne.
Elle paru soulagée qu’il soit un parfait étranger mais aussi intriguée qu’il s’intéresse à cette chorale.
Elle voulu savoir comment il connaissait cette chorale.
En fait, il ne la connaissait pas mais il avait deviné que ces personnes allaient vers le temple...
Elle fut amusée qu’un étranger ait vu des choses dans ce tumulte.
Elle ne lui répondit pas de suite pour l’hôtel, mais elle lui décrivit la foule effervescente et surtout pourquoi c’était bien qu’il soit là : pour deux raisons s’il le voulait bien.
 Il serai son rapporteur de ce qu’il verrait et il allait en voir dès le lendemain !
 Il fallait un témoin des événements pour qu’ils soient connus.
Le lendemain, la justice serait rendue pour un vol d’une tige de canne à sucre qu’un homme avait voulu rapporter à sa famille.
Elle lui dit que pour trouver un hôtel, il fallait suivre l’homme à la caisse à roulettes, il le conduirait. Elle espérait aussi qu’il lui explique la situation.

Le visiteur
Justine

La mélodie du vacarme

L’homme ne semblait pas pris d’une fièvre particulièrement causante. Il avait le visage dur et ses yeux balayaient le trottoir, d’un va et vient bien plus saccadé et rapide que les scansions, pourtant dignes de métronomes, des femmes devant leurs maisons. Elle n’insista qu’à peine et comprit que toute tentative serait vaine.
Un grincement, rouillé et mélodieux vint rompre le vacarme pourtant silencieux qui soufflait dans les rues. La caisse à roulette... Le choc des bouteilles vides, entre elles, et contre les parois en bois résonnait, d’un son clair, et sourd, le vent dans les goulots, une inspiration sibylline. Comme s’il savait être attendu, il arriva, d’un pas fier, la tête si haute qu’on devinait les stries de son palais derrière son sourire. Sans attendre qu’on le hèle, il s’avança vers Salomé et l’étranger, au regard fuyant, vers un horizon invisible.
Sans se présenter, ni rien demander, il allongea un long doigt rêche, à l’ongle brillant, presque nacré vers le bout de la rue, vers la toute petite maison, sableuse et sombre, dont il ne restait du manguier qu’une souche rabougrie.
Il siffla comme pour se donner du courage, parti d’un rire sincère devant les deux visages circonspects et ouvrit la route dans une mélodie que Salomé l’avait souvent entendu entonner.

Elle frémit en entrant dans la maison vide. Plusieurs fois elle avait pensé passer cette porte. Par curiosité, pour chercher le frisson, sentir un élan d’aventure pénétrer ses pores... Mais jamais elle n’avait osé traverser la route. Bien trop sage, bien trop obéissante, bien trop naïve.

Ils étaient là, plongés dans l’obscurité, emprunte de la musique du quotidien, du dehors, tous les trois. La maison faisait naître une angoisse profonde dans le ventre de Salomé et le visiteur ne cessait de se toucher les cheveux. Un bourdonnement insondable et incessant crépitait à leurs oreilles, comme si des milliers de voix s’y glissaient indistinctement. L’homme aux bouteilles planta alternativement son regard dans celui de Salomé et du visiteur pour aspirer toute leur attention avant de dire :
"Tout est là, dans les murs, les angles et les expirations de la chaux...". Il partit, ses bouteilles bringuebalantes derrière lui, sa voix s’estompant dans la poussière de la route.

Le visiteur

Clap 3

L’imaginaire de SALOME allait bon train. Que se cachait -il derrière cette pièce ? Un mystérieux livre parsemé de couleurs vives, des personnages inquiétants, à la description féroce. Prise dans l’histoire, elle s’attacha à la fibre de l’écrivain. Une curieuse impression de mélange entre réalité et fiction, rendait l’histoire encore plus captivante. L’émotion cachée derrière les mots, lui fit revivre ses premiers émois amoureux avec la lecture.
Ce n’était pas un conte, un récit quelque peu futuriste. Ses souvenirs d’enfance rebondissaient avec ce qu’elle lisait. Les détails de la personnalité d’une femme de caractère, troublaient ces pensées, celles ci s’entrechoquaient avec l’image de sa mère.
La peur de l’interdit, la découverte de l’inconnu dans un lieu énigmatique, le besoin de jouer, de créer se faisait sentir jusque dans les pores de sa peau. Son esprit vagabonde, ses yeux explorent la pièce.
Elle revient à la lecture.

Le visiteur
Verte

Salomé lit !

Et dans ce livre elle voit une jeune fille comme elle, assise dans un fauteuil. Elle la devine troublée, inquiète, cherchant des réponses... Enfin, elle lit son nom, Salomé ! Comme elle, c’est fou mais c’est elle... Elle ne veut plus rien découvrir ; la peur fait place à l’envie de d’avancer, de savoir la suite, de faire défiler les mots au plus vite, de se plonger dans du récit, dans des histoires, des rencontres... tout cela c’est bien quand c’est pour de faux, quand c’est pour rire, quand c’est comme la vie mais pas vraiment. Mais la nécessité de poursuivre le récit redevient impérieuse, elle continue donc, elle sent qu’elle va à la rencontre de quelque chose de capital, elle entend, dans les lignes, le tintement des boites de métal et une voix grave et chaleureuse qui lui semble familière.

Le visiteur
Dworczak

Nos gens...!

Salomé essayait, entre la lecture de son roman et la voix de sa mère, de comprendre...de discerner le texte, les propos de sa mère...pourquoi disait-elle...ce sont nos gens ?
Dans le roman les domestiques désiraient retrouver une certaine liberté...le pouvaient-il ?
En réalité, les domestiques avaient des devoirs, des charges, des obligations et ils leur étaient presque impossible d’émettre un jugement, une opinion...ce sont nos gens...!
Sa mère avait parlé, le livre parlait ? Les domestiques sont-ils nos gens ?

Le visiteur
Bruno

Le visiteur

Toute la foule le vit traverser cette espace sans prêter attention à lui.
Au milieu de l’effervescence, il vit le regard d’une jeune enfant assise derrière une clôture de bambou, malgré l’éloignement et sans doute à cause de la lumière particulière. Elle lui fit signe ; il alla lui demander où il pourrait trouver un hôtel. Mais les quelques mots du pays qu’il connaissait ne suffisaient pas, il essaya en allemand, pensant que si elle allait à l’école des missionnaires , elle devait pouvoir comprendre.
Alors elle commença à parler, elle lui demanda pourquoi il était là, qui il venait rencontrer. Il avait entendu parler de cette chorale et il était venu pour l’écouter, il venait de loin et ne connaissait personne.
Elle paru soulagée qu’il soit un parfait étranger mais aussi intriguée qu’il s’intéresse à cette chorale.
Elle voulu savoir comment il connaissait cette chorale.
En fait, il ne la connaissait pas mais il avait deviné que ces personnes allaient vers le temple...
Elle fut amusée qu’un étranger ait vu des choses dans ce tumulte.
Elle ne lui répondit pas de suite pour l’hôtel, mais elle lui décrivit la foule effervescente et surtout pourquoi c’était bien qu’il soit là : pour deux raisons s’il le voulait bien.
 Il serai son rapporteur de ce qu’il verrait et il allait en voir dès le lendemain !
 Il fallait un témoin des événements pour qu’ils soient connus.
Le lendemain, la justice serait rendue pour un vol d’une tige de canne à sucre qu’un homme avait voulu rapporter à sa famille.
Elle lui dit que pour trouver un hôtel, il fallait suivre l’homme à la caisse à roulettes, il le conduirait. Elle espérait aussi qu’il lui explique la situation.

Le visiteur
Justine

La mélodie du vacarme

L’homme ne semblait pas pris d’une fièvre particulièrement causante. Il avait le visage dur et ses yeux balayaient le trottoir, d’un va et vient bien plus saccadé et rapide que les scansions, pourtant dignes de métronomes, des femmes devant leurs maisons. Elle n’insista qu’à peine et comprit que toute tentative serait vaine.
Un grincement, rouillé et mélodieux vint rompre le vacarme pourtant silencieux qui soufflait dans les rues. La caisse à roulette... Le choc des bouteilles vides, entre elles, et contre les parois en bois résonnait, d’un son clair, et sourd, le vent dans les goulots, une inspiration sibylline. Comme s’il savait être attendu, il arriva, d’un pas fier, la tête si haute qu’on devinait les stries de son palais derrière son sourire. Sans attendre qu’on le hèle, il s’avança vers Salomé et l’étranger, au regard fuyant, vers un horizon invisible.
Sans se présenter, ni rien demander, il allongea un long doigt rêche, à l’ongle brillant, presque nacré vers le bout de la rue, vers la toute petite maison, sableuse et sombre, dont il ne restait du manguier qu’une souche rabougrie.
Il siffla comme pour se donner du courage, parti d’un rire sincère devant les deux visages circonspects et ouvrit la route dans une mélodie que Salomé l’avait souvent entendu entonner.

Elle frémit en entrant dans la maison vide. Plusieurs fois elle avait pensé passer cette porte. Par curiosité, pour chercher le frisson, sentir un élan d’aventure pénétrer ses pores... Mais jamais elle n’avait osé traverser la route. Bien trop sage, bien trop obéissante, bien trop naïve.

Ils étaient là, plongés dans l’obscurité, emprunte de la musique du quotidien, du dehors, tous les trois. La maison faisait naître une angoisse profonde dans le ventre de Salomé et le visiteur ne cessait de se toucher les cheveux. Un bourdonnement insondable et incessant crépitait à leurs oreilles, comme si des milliers de voix s’y glissaient indistinctement. L’homme aux bouteilles planta alternativement son regard dans celui de Salomé et du visiteur pour aspirer toute leur attention avant de dire :
"Tout est là, dans les murs, les angles et les expirations de la chaux...". Il partit, ses bouteilles bringuebalantes derrière lui, sa voix s’estompant dans la poussière de la route.

Le visiteur

Clap 3

L’imaginaire de SALOME allait bon train. Que se cachait -il derrière cette pièce ? Un mystérieux livre parsemé de couleurs vives, des personnages inquiétants, à la description féroce. Prise dans l’histoire, elle s’attacha à la fibre de l’écrivain. Une curieuse impression de mélange entre réalité et fiction, rendait l’histoire encore plus captivante. L’émotion cachée derrière les mots, lui fit revivre ses premiers émois amoureux avec la lecture.
Ce n’était pas un conte, un récit quelque peu futuriste. Ses souvenirs d’enfance rebondissaient avec ce qu’elle lisait. Les détails de la personnalité d’une femme de caractère, troublaient ces pensées, celles ci s’entrechoquaient avec l’image de sa mère.
La peur de l’interdit, la découverte de l’inconnu dans un lieu énigmatique, le besoin de jouer, de créer se faisait sentir jusque dans les pores de sa peau. Son esprit vagabonde, ses yeux explorent la pièce.
Elle revient à la lecture.

Le visiteur
Verte

Salomé lit !

Et dans ce livre elle voit une jeune fille comme elle, assise dans un fauteuil. Elle la devine troublée, inquiète, cherchant des réponses... Enfin, elle lit son nom, Salomé ! Comme elle, c’est fou mais c’est elle... Elle ne veut plus rien découvrir ; la peur fait place à l’envie de d’avancer, de savoir la suite, de faire défiler les mots au plus vite, de se plonger dans du récit, dans des histoires, des rencontres... tout cela c’est bien quand c’est pour de faux, quand c’est pour rire, quand c’est comme la vie mais pas vraiment. Mais la nécessité de poursuivre le récit redevient impérieuse, elle continue donc, elle sent qu’elle va à la rencontre de quelque chose de capital, elle entend, dans les lignes, le tintement des boites de métal et une voix grave et chaleureuse qui lui semble familière.

Le visiteur
Dworczak

Nos gens...!

Salomé essayait, entre la lecture de son roman et la voix de sa mère, de comprendre...de discerner le texte, les propos de sa mère...pourquoi disait-elle...ce sont nos gens ?
Dans le roman les domestiques désiraient retrouver une certaine liberté...le pouvaient-il ?
En réalité, les domestiques avaient des devoirs, des charges, des obligations et ils leur étaient presque impossible d’émettre un jugement, une opinion...ce sont nos gens...!
Sa mère avait parlé, le livre parlait ? Les domestiques sont-ils nos gens ?